lundi 13 juillet 2009

Mais, aujourd'hui

Aujourd’hui. Aujourd’hui est différent de l’autre Pourtant, c’est encore un aujourd’hui Tu peux le nommer à ta guise mais pour moi les aujourd'hui sont des nexus inclassables Ouvrir les yeux, poser les pieds à terre, respirer, nager dans le courant ou à contre courant, sombrer ou se laisser flotter, dormir, courir, qu’importe ! Cela n’est jamais assez.

Les aujourd’hui exigent une participation active, même à l'arrêt

Ils filent les voies officielles ou détournées comme un costume d'époque obligatoire, informe, où tous les fils sont emmêlés J’en portais un, au hasard et incognito, plus par lassitude que par conviction comme tous les autres jouets des aujourd'hui.

Tout en élaborant leurs stratégies, en construisant leurs histoires, ils multiplient les fausses pistes, les tentations, les inclinaisons, les angles aigus, les culs de sacs, les envolées et les glissades…Ils adorent cela. Je ne vais pas énoncer tous leurs artifices mais je sais - comme tu le sais - qu’il n’y a pas d’issue ni d'alternative aux jeux des aujourd’hui. Juste des aires provisoires, des aires anesthésiantes, des aires euphorisantes, des aires aveuglantes, des aires intimes des aires d’observations et même des aires de tortures, de démembrements, d’ éviscérations de conditionnements …

Sauf que, aujourd’hui, la fumée était particulièrement belle. Elle faisait des volutes lentes et bleues tout autour de mes mains, sans chaleur, sans brûlure.

L'air immobile, elle ne voulait pas s'envoler Alors je suis restée là, longtemps, dans cette pièce vide, à la regarder danser comme en apesanteur, envoûtée, prisonnière.

C’était pourtant un aujourd’hui ordinaire, monotone, qui aurait pu se perdre comme tous les autres dans la fosse aux hier, s'il n'y avait eu ces volutes, lentes et bleues.

C

...

Comme tu m'avais laissé les clés, je suis entré dans ta maison. Tu n'étais pas là. Il y avait sur la table de ta chambre ce que tu venais d'écrire aujourd'hui. Je l'ai lu. C'est une lecture un peu volée, je le sais.
En lisant, je voyais ces journées passées et cette fumée que tu décrivais, elle te filait entre les doigts. J'ai fermé les yeux, j'ai essayé de sentir, restait-il une odeur, un parfum de ce que tu avais ressenti ? Je n'ai rien remarqué, seulement un silence dans cette obscurité.
Je me suis assis. Comme toi j'ai regardé mes mains, ma main, celle qui n'a pas tenu la tienne. Il m'a semblé qu'elle n'était plus la même, j'avais un peu de mal à l'ouvrir en entier. Je les ai pourtant jointes, les deux, comme dans une prière et posées sur mes yeux.
Dans le noir, je respirais à travers la peau des mains collées sur mon visage. Il n'y avait plus de traces de celles que j'avais prises, toutes ces mains qui ont touché ma bouche, plus leur odeur, plus leur saveur, peut-être un goût de cigarette.
Rien qu'à les regarder, je savais ce qui s'était passé. Sur le M marqué par ces lignes de vie et de chance, d'autres traits s'étaient inscrits, des nouveaux, d'autres pliures encore. On aurait dit que cette lettre était rayée. A côté, une veine bleue palpitait.

M.

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